14 avril 2022

L’accompagnement du personnel transgenre en entreprise

Rédigé par Joelle Jablan, conseillère diversité et inclusion

Agir dans une logique de responsabilité sociétale

Notre société est structurée de manière essentiellement binaire de manière telle que les individus sont représentés comme étant soit homme, soit femme. Toutefois, certaines personnes ne se reconnaissent pas dans l’identité qui leur a été assignée à la naissance. Elles peuvent alors entamer un parcours de transition afin de mettre leur identité sociale en accord avec leur identité de genre.

Selon une étude de l’Institut pour l'égalité des femmes et des hommes (IEFH) réalisée en 2020 sur « L’identité de genre des Belges », près de 1% des Belges s’identifient comme personnes transgenres. L’enquête présente toutefois des limites sur la manière dont les personnes interrogées s’identifient dans des catégories prédéfinies : « Il semble donc plausible que la terminologie soit encore insuffisamment connue, que les personnes ne s’y identifient pas toujours ou ne trouvent parfois pas les mots pour décrire leur propre identité de genre. Des recherches supplémentaires à ce sujet seraient les bienvenues. »

 

L’identité de genre n’est pas une notion lisse, elle est à l’image de la complexité de l’individu. Ainsi une personne peut se sentir homme ou femme indépendamment de son sexe biologique, peut avoir un genre qui évolue et change au cours de la vie, peut s’identifier à la fois comme homme et femme, ou encore à ni l’un ni l’autre.

Dans tous les cas, elle doit pouvoir trouver sur son lieu de travail un espace où elle se sent en sécurité, respectée et épanouie.

Les personnes transgenres constituent un groupe particulièrement vulnérable en matière de discrimination. Selon un rapport de l’IEFH « Être transgenre en Belgique » de 2009, les études montrent que la transition sur le lieu de travail est le moment où la discrimination et l’inégalité sont maximales. Pour 50 % des personnes répondantes à l’enquête Être une personne transgenre en Belgique, Dix ans plus tard, le domaine de l’emploi constitue le plus grand obstacle qui empêche de vivre selon son identité de genre.

 

Pour faciliter le coming-out sur le lieu de travail, il est important que l’entreprise crée un climat de sécurité psychologique (psychological safety) avec des pratiques concrètes. Or, dans la plupart des cas aucune procédure n’a été pensée en amont pour accompagner le parcours de transition d’une personne transgenre en entreprise.  L’organisation adopte une approche réactive et dans l’urgence lorsque la situation se présente plutôt qu’une approche proactive favorisant le sentiment d’inclusion et de bien-être de son personnel.

Certaines bonnes pratiques peuvent être mises en exergue pour aider les entreprises à formaliser une procédure claire d’accompagnement de ses salarié·es transgenres. Rencontre avec Kelly Williame.

Lorsque Kelly fait son coming-out trans dans son entreprise, une société coopérative à finalité sociale active dans le domaine de l’informatique, elle trouve auprès de ses collègues les plus proches et de la direction générale le soutien nécessaire pour officialiser sa transition.

Informer les collègues

Pour éviter les rumeurs et les malentendus, la direction générale organise, en concertation avec Kelly, une réunion avec l’équipe pour annoncer la transition de genre de sa collaboratrice. Elle précise son prénom d’usage ainsi les pronoms à utiliser. Elle réitère les valeurs qui sont chères à l’entreprise : inclusion et respect de l’individu, ainsi qu’une tolérance 0 vis-à-vis des discriminations.

Informer les clients et fournisseurs

En concertation avec Kelly, et avec le soutien du Tels Quels, une association LGBTQIA+, la direction générale rédige également un communiqué officiel à l’intention de ses clients et fournisseurs afin de :

  • Réaffirmer les valeurs de l’organisation : diversité, inclusion et de respect visà-vis de la démarche de Kelly, et
  • D’insister sur le fait que la transition de genre ne modifie en rien les compétences professionnelles.

Sensibiliser sur la transidentité au sein de l’entreprise

Si la direction générale a fait appel à une association LGBTQIA+ pour l’aider dans ses démarches d’information, Kelly concède toutefois que c’est elle qui assume la charge de sensibiliser ses collègues au jour le jour sur la transidentité:

 « Je suis active dans les associations LGBTQIA+ et sensibilisée à ces questions, donc je sais quoi répondre. Pour une personne qui n’aurait pas tous les acquis, il me semble important qu’elle ne prenne pas seule en charge ce travail pédagogique, mais qu’un partenaire spécialisé sur la thématique puisse sensibiliser les équipes. Par exemple, le Tels Quels, Genres Pluriels, la RainbowHouse etc.»

Une collègue proche de Kelly, nous confie « Parfois, je me trompe encore de prénom... ». Kelly reconnait qu’un temps d’adaptation est nécessaire : « Certains employés me genre encore au masculin. Cela ne me pose pas de problème tant que ce n’est pas volontaire ».

« Depuis mon coming-out, d’autres personnes ont fait leur coming-out. »

A la suite du coming-out de Kelly, d’autres actions en faveur des l’inclusion des personnes LGBTQIA+ ont été mises en place de manière plus ou moins formelle au sein de l’entreprise :

  • Référencement sur Google en tant qu’entreprise LGBT+ friendly
  • Kelly encourage également ses collègues à ne pas maintenir la dichotomie Madame / Monsieur dans les communications et de préférer des allocutions telles que « Bonjour » dans les emails ou « Bonjour, comment puis-je vous aider » dans les échanges téléphoniques.

Le soutien de la direction générale et les différentes actions mises en oeuvre ont envoyé un signal fort d’inclusion et de respect des différences individuelles dans l’entreprise. C’est ainsi que, par la suite, 3 personnes ont fait leur coming-out.

« Ces collègues avaient bien vu qu’avec moi ça c’était bien passé, donc certains ont franchi le cap. J’avais été la bombe qui avait fait changer pas mal de choses. » raconte Kelly.

 

Quelques ressources pour aller plus loin :

 

Cette réflexion s’inscrit dans le cadre du Projet So-divercity de BRUXEO ayant pour but de promouvoir la diversité et de lutter contre toutes les formes de discrimination dans la gestion quotidienne des entreprises à profit social bruxelloises. Découvrez nos différents services ici.